El Poto Del Mondo | Bota Bota, spa-sur-l'eau

Évasion

El Poto Del Mondo

Des spas les plus exotiques de ma vie – monastère zen « hotspring » en Californie, thermes italiens en marbre pour affligés de la goutte- une image m’est restée gravée à jamais : celle du spa de Puyuhuapi en Patagonie. Je peux affirmer que je suis allée jusqu’au bout du monde, rien que pour me plonger dans ces eaux thermales chauffées par des poches volcaniques entre 40 à 50 degrés Celcius. 17h d’avion, 2h30 d’autobus et 5h de catamaran pour me réveiller dans ce coin du Chili qu’on appelle « el poto del mondo », le cul du monde.

J’y allais pour essayer le watsu-water shiatsu – un massage aquatique qui vous envoie valser le stress jusqu’au pôle Sud pour oublier la durée du voyage et la folie de l’itinéraire. Dans ce lieu digne du National Geographic et de l’émission Thalassa, on retrouve des lacs miroirs et des montagnes enneigées, des fjords, de la pampa, de la toundra et la cordillère des Andes. Les écotouristes sont encore timides et les amateurs de sea-doo aux abonnés absents. Par ici, la paix.

Pourquoi aller si loin pour se fermer les yeux dans un bassin d’eau chaude sous les étoiles de la Patagonie? Ces firmaments généreux accueillent des constellations aux noms évocateurs comme la croix du Sud, toucan, oiseau de paradis, couronne australe… Ici, aucune pollution lumineuse, aucune pollution tout court, que les effets secondaires du réchauffement planétaire, la fonte des glaciers.

Mais la véritable raison, c’est le dépaysement. Et l’impression de venir se délester de tout, de dénouer ses nœuds. Ici, la nature agit sur notre regard, notre vision, notre capacité d’abandon. Un sentiment étrange de pureté et de virginité nous envahit.

Telle une « born again virgin », je suis « re-née » à Puyuhuapi. J’ai laissé là une fille du siècle dernier. Revenue chez nous, j’ai réalisé que l’eau, peu importe le sens dans lequel elle gyre dans les lavabos, peut vous laver de tout.

Je ne retournerai jamais à Puyuhuapi; j’en ai l’intime conviction. Mais chaque fois que je vais au spa, j’ai une petite pensée pour ce lieu qui baigne au fond de moi : pur, lisse, silencieux et infini.

www.patagonia-connection.com
Josée Blanchette
Journaliste indépendante, conférencière et chroniqueuse au journal Le Devoir